L'effet interruptif des actions tendant au recouvrement des créances

Le délai de prescription d’une créance correspond à la période laissée au créancier pour introduire une action en justice afin d’obtenir le paiement de la somme due par le débiteur. Une fois l’action prescrite, peu importe le bien-fondé de sa demande, le créancier ne peut plus obtenir le remboursement de la créance par voie judiciaire.

Ainsi les causes d’interruption et de suspension de ces délais peuvent être cruciales pour recouvrer une créance. C’est dans ce contexte que la Cour de cassation a précisé que la prescription de l’action en recouvrement d’une créance peut être interrompue par une action en paiement lorsqu’elles tendent au même but, à savoir le désintéressement de la même créance.

Deux prêts immobiliers ont été consentis par un établissement de crédit à un couple le 1er mars 2007. À la suite d’impayés, la banque a assigné les emprunteurs en paiement des sommes dues au titre des prêts, les 9 et 12 décembre 2011.  Le juge de la mise en état a, par une ordonnance du 16 novembre 2012, ordonné le sursis à statuer dans l’attente du prononcé d’une décision pénale définitive.

Se fondant sur les titres qu’il détenait, l’établissement de crédit a pris une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire sur l’un des biens financés le 25 juin 2019 et procédé à la saisie-attribution de sommes dont les emprunteurs étaient créanciers le 20 août 2019. Les emprunteurs ont alors assigné la banque en nullité et mainlevée de l’inscription d’hypothèque et de la saisie-attribution en invoquant la prescription des créances.

Ces demandes étant rejetées par les arrêts d’appel, ceux-ci font l’objet de pourvois en cassation, joints en raison de leur connexité. En effet, les emprunteurs soutenaient que : « La prescription de l'action en recouvrement d'une créance en vertu d'un titre exécutoire ne peut être interrompue par une action qui a pour objet distinct une demande en paiement d'une créance en vue d'obtenir un titre exécutoire ».

Ainsi, les demandeurs considéraient que les assignations en paiement en vue d’obtenir un titre exécutoire, des 9 et 12 décembre 2011, n’avaient pas interrompu la prescription de l’action en recouvrement des créances en vertu du titre exécutoire que constitue l’acte notarié.

Les pourvois sont rejetés par la Cour de cassation qui affirme que l'action en paiement d'une créance, introduite par un prêteur, tend au même but que l'action en recouvrement de cette même créance, à savoir son désintéressement.

Dès lors, la cour d’appel qui a constaté que la banque avait assigné les prêteurs en paiement du solde restant dû et que cette instance était toujours en cours au moment de l’inscription hypothèque et de la saisie-attribution, en a exactement déduit que ces actions tendant toutes deux au désintéressement du prêteur, l’effet interruptif des assignations a rejailli sur la prescription de l’hypothèque et de la saisie-attribution.

Référence de l’arrêt?: Cass. civ. 1ère du 12 juillet 2023, 21-25.587